Thierno Aliou Bhoubha N'Diyan a Dakar

Thierno Aliou fut maintenu jurisconsulte coranique et nommé membre du comité consultatif des affaires musulmanes

de I' Afrique Occidentale Française (A.O.F).

C'est à ce titre qu'il fut invité Dakar en 1916 avec beaucoup d'autres grands marabouts de quelques territoires de

I'A.O.F. par le Gouverneur général Clausel sur proposition de Paul Marty, Directeur des affaires musulmanes du

gouvernement général.

L'administration coloniale française soucieuse de pérenniser le calme et la sécurité dans ses colonies était très à

cheval sur les renseignements. Elle redoutait de façon permanente des révoltes de ses sujets portait une attention

particulière sur toute information (vraie ou fausse) sur les questions de sécurité.

Ce faisant, se fondant sur une foule d'informations sur les grands intellectuels musulmans de I'AOF de l'époque elle

décida de faire venir en même temps à Dakar, siège du gouvernement général de l’AOF, qui étaient estimes

pouvoir faire l’opinion et soulever les populations.

Parmi ceux-ci on peut citer: Thierno Aliou Bhoubha N'Diyan de Labé ami de Thierno Aliou Waliyyu de Gomba en

Guinée, Cheick Ahmadou Bamba de Touba, Elhadj Malick Sy de Tivouane au Sénégal.

Thierno Aliou logea chez Elhadj Malick Sy qui, en bon connaisseur des blancs informa son visiteur des us et

manières des colons. En retour Thierno Aliou prodigua d'abondantes bénédictions en faveur de la famille hôte.

Les participants furent soumis à des tests varies durant sept mois. Au premier contact avec l'autorité coloniale il est

demande à chacun des participants, de rédiger quelque chose à I ‘adresse du Gouverneur général. La plupart

écrivit la profession de foi du musulman ou la prière au prophète. Thierno Aliou, lui, écrivit une lettre en bonne et due

forme en ces termes:

« Je respecte la France pour les trois raisons ci-après :
1. La première est votre attachement à la justice a ce point que tous sont égaux devant le droit. Le faible obtient son droit du fort et le plus fort ne peut opprimer le  faible;
2. La deuxième est la sécurité dont par vous jouissent les routes, au point qu'une femme qui porte son bien va ou elle veut sans crainte de violence ou de pillage;
3. La troisième est I ‘aide que vous nous apportez pour le maintien de fa religion musulmane au point que la Mosquée de Labé ayant brule en saison d'hivernage, vous nous avez prêté assistance pour la restaurer; sans vous les pluies auraient achevé de la détruire.
Ces raisons imposent la sympathie pour vous dans chacun sans compter les belles qualités que nous voyons dans les français comme l'amour des gens vertueux, la rigueur envers les méchants ».

Des tests à caractère intellectuel furent ensuite soumis aux marabouts. Une fois, le gouverneur général fit placer

sous des fauteuils de son salon une pièce de deux (2) Francs. Il fit entrer ses << visiteurs >> et fit installer Thierno

Aliou sur ce fauteuil. Tout le monde installe, le gouverneur demanda à I ‘assistance de lui dire la distance qui sépare

la terre de la lune. Après beaucoup d'hésitations Thierno Aliou répondit : « Entre la terre et la lune il y a la distance

connue plus I' épaisseur d'une pièce de 2 Francs ». A la fin des tests le gouverneur reconnut en Thierno Aliou l’Imam

Ratib de tous les participants suivi d’Elhadj Malick Sy du Sénégal.

Ayant ainsi découvert qui était le vrai Thierno Aliou Bhoubha N'Diyan, le gouverneur décida de lui montrer la lettre

anonyme qu'il avait reçue a son sujet. A la lecture de la lettre Thierno Aliou et son frère Benjamin Thierno Mouctar

reconnurent L’écriture de I' ancien Talibé du Walliyyu écrite sous la dictée du Chef de canton de Labé d’alors.

Comme réaction le benjamin proposa a son frère de « s'occuper» du personnage: celui-ci rétorqua « nous ne nous

mêlerons pas de cette affaire des lors que L’intéressé répondra de sa forfaiture devant Allah ».

II faut rappeler que Thierno Aliou était accompagné de son voyage à Dakar par son frère benjamin Thierno Mouctar

Donghol, père de Bappa Haady.

Thierno Aliou ramènera de son voyage en 1917 beaucoup de livres théologiques de tous genres. Son influence et

son autorité grandirent considérablement. Il continua d’assumer ses responsabilités juridiques jusqu'en 1924 puis

céda la place à son fils ainé Thierno Siradiou.

De 1924 à sa mort le 23/03/1927, il se consacra uniquement et entièrement I ‘enseignement du Coran et a ses

fonctions d'Imam Ratib de la Mosquée de Labé.

Thierno Aliou, a sa mort, aurait laissé comme fortune quatre cents francs et une bibliothèque de six cents ouvrages.

II a laissé derrière lui une grand famille dont les membres résidents a Labé constituent << la famille Bah de Dowsare

>> qui, contrairement aux autres familles maraboutiques Fouta-Djallon, compte beaucoup d'intellectuels en français.

Thierno Aliou avait compris très tôt I ‘avantage de mettre ses enfants à l’école française parallèlement aux études

coraniques.

 

El Hadj Karamoko Ciradiou Balde